Certains demandaient comment Lucas avait pris la nouvelle...
Comme vous pouvez vous l'imaginer, ça n'a pas été facile de lui expliquer. Au début on a préféré le laisser à l'écart de tout ça, inutile de l'inquiéter tant qu'on ne savait pas exactement, on ne voulait pas qu'il se fasse du souci tant qu'on était dans l'inconnu. Et puis il y a eu la consultation d'annonce, le diagnostic définitif, et là on ne pouvait plus reculer.
Comment expliquer cela à un petit garçon ? Que son monde s'écroulait à nouveau. Que son petit rein était malade. Qu'il allait falloir repartir pour plusieurs mois de traitements. Qu'il faudrait encore beaucoup de patience, de contraintes, de passages à l'hôpital, d'examens, de bilans sanguins, de suivi, d'interdits... Lui à qui on promettait quelques jours plus tôt que tout serait bientôt fini, qu'il ne restait plus qu'une seule hospitalisation, plus que 28 jours de roaccutane, et qu'ensuite on ne viendrait que pour des consultations. Qu'il pourrait enfin souffler, enfin retrouver une vie plus normale, refaire plein de choses dont il rêvait depuis longtemps.
La fin des traitements était notée en grand sur le calendrier de la cuisine. Une date qu'on attendait avec impatience... Une date qui restera malgré tout celle du dernier comprimé de notre combat contre le neuroblastome, mais qui devient tout de suite plus floue quand ce fameux comprimé est perdu au milieu des autres, et qu'on sait qu'on est loin d'en avoir terminé...
Lucas a accusé le coup, bien sûr, même si on ne lui a pas tout expliqué dans les détails. Il a eu peur qu'on doive le réopérer et lui enlever son petit rein, parce qu'il se souvenait que quand on avait dû lui enlever le premier, on lui avait expliqué qu'il faudrait prendre très soin du deuxième parce qu'il ne resterait plus que lui.
Il avait peur aussi de se retrouver avec une énorme cicatrice comme la dernière fois, les drains, les pansements... On s'est rendus compte avec Julien qu'il avait gardé beaucoup de séquelles psychologiques de cette opération, et que la cicatrice qui lui barre le ventre est peut être la plus visible mais pas la plus profonde...
Bon et puis après tout ça, quelques larmes quand même mais surtout des calins et des explications rassurantes de Papa et Maman, Lucas nous a une fois de plus prouvé son courage et sa maturité et nous a déclaré dès le lendemain que "c'est la vie hein, on choisit pas alors c'est pas la peine d'être triste".
Que rajouter d'autre ? Un petit bonhomme de six ans qui vous sort une telle phrase, moi ça me laisse sans voix...
Jeudi il retourne à l'école. Pour la matinée seulement, il est très fatigué et a du mal à récupérer du passage en réa, mais je pense que ça va lui faire beaucoup de bien. C'est tellement important pour lui l'école, que l'effet bénéfique sur le moral sera surement plus fort que la fatigue. Et puis il y a deux semaines de vacances après pour récupérer, alors tant qu'il peut, autant en profiter. Un jour d'école, c'est un jour de gagné, et chaque petit bonheur qu'on peut attrapper au vol, on le prend sans hésitation. Je ne sais plus laquelle de vous l'a dit dans son commentaire, mais elle avait raison : il ne faut pas seulement subir la maladie, il faut aussi VIVRE !