Je prends enfin le temps de répondre aux questions que j'ai reçues ces derniers temps... J'ai lu tous vos mails et commentaires mais je n'ai probablement plus tout en tête alors pardonnez-moi si j'en oublie certains, n'hésitez pas à me les renvoyer si c'est le cas...
La rechute a été découverte sur les images des examens, Lucas n'avait absolument aucun symptôme ni aucune douleur. Des cellules cancéreuses ont été trouvées au niveau thoracique (à l'endroit de la tâche suspecte aux examens précédents), ainsi que sur une vertèbre et au niveau du bassin, là où il avait pourtant déjà été traité par radiothérapie.
Le protocole qu'il suit actuellement s'appelle TOTEM. Ce sont des cures de cinq jours tous les mois et il a deux chimios, une en comprimés à avaler (temodal) et une autre en perfusion (topotecan). Pendant ces cinq jours on va donc tous les jours à l'hôpital et on rentre le soir. En dehors de ces cures il a des prises de sang tous les trois jours et un bilan avec le médecin tous les jeudis. Des examens de contrôle auront lieu tous les deux mois pour mesurer l'efficacité du traitement. Il n'y a pas de nombre de cures fixe, on continuera cette chimio tant qu'elle fonctionnera, le plus longtemps possible j'espère, et si elle reste efficace à ce que j'ai compris on peut la poursuivre jusqu'à deux ans. Oui, ça peut paraitre fou mais notre espoir maintenant ce n'est plus d'arriver à la fin des chimios, c'est juste de pouvoir continuer ces chimios...
Après discussion avec l'oncologue et des dizaines d'heures de recherches sur internet, nous savons que si ce protocole ne fonctionnait pas il reste d'autres possibilités, mais qui sont malheureusement soit au stade d'essai thérapeutique (sans résultats fiables et sans recul), soit des traitements qui ne font que ralentir l'évolution de la maladie. D'autres pistes existent également à l'étranger. Nous nous tenons au courant de ce qui s'y passe, notamment aux USA, car si un jour nous étions à cours d'options ici en France, il n'est pas impossible que nous cherchions d'autres solutions ailleurs (avec tout ce que ça implique, tant au niveau financier qu'organisationnel, mais nous n'en sommes pas là...).
Au quotidien Lucas vit sa vie de petit garçon de 9 ans, il continue d'aller à l'école une grande partie du temps (même les jours de chimio il y va 1h30 le matin !) et malgré les absences il suit le rythme et rattrape les leçons. Il est plus fatigué certes, il a moins d'appétit, mais il ne se laisse pas arrêter par si peu et il a gardé son petit caractère et sa joie de vivre. Il est juste limité par son PAC, donc pas d'activité avec risque de choc (donc pas de judo), et toute la série de précautions par rapport au risque infectieux.
Derrière cette "normalité" apparente, pour nous c'est tout un chamboulement. Après avoir épuisé tous mes congés j'ai du me résoudre à quitter mon travail, car oui c'est ça aussi la conséquence du cancer. Pas le choix, il faut forcément quelqu'un de disponible au quotidien pour Lucas, pour l'emmener à l'hôpital, aux différents rdv, le garder à la maison si ça ne va pas ou le récupérer à 10h parce que la maitresse appelle, gérer ses médicaments, réagir immédiatement en cas de problème (s'il est en aplasie à la moindre hausse de température c'est l'hôpital immédiatement)... Absolument rien n'est prévisible, alors impossible de concilier tout ça avec un travail même à temps partiel. Impossible de prévoir quoi que ce soit non plus pour les vacances cet été, on verra au dernier moment sur des weekends mais à vrai dire je n'ai pas l'esprit à ça... Je ne vous parle là que du côté pratique, mais évidemment c'est difficile aussi au niveau psychologique. Il faut accepter que la maladie soit revenue, accepter de vivre à nouveau au jour le jour, faire face à la peur du lendemain et à toutes les difficultés que nous savons à venir, et puis réussir à se lever le matin et à avancer en gardant espoir tout en sachant que les statistiques sont contre nous et qu'on court contre le temps... Nous avons chacun notre façon de réagir avec son Papa et c'est parfois compliqué de se comprendre, notre douleur personnelle nous rendant encore moins patient et compréhensif envers l'autre. Et puis il a fallu (et il faut encore parfois) l'annoncer à la famille et à l'entourage proche. C'est difficile de trouver les mots, de savoir qu'on va leur faire mal quoi qu'il arrive, et de tenir bon face à leurs réactions, de retenir nos larmes, d'être parfois plus forts qu'eux et de se prendre en pleine face des réflexions que je ne pense pas malveillantes mais qui sont parfois tellement maladroites et blessantes. Un détail pratique parmi tant d'autres que les parents d'enfants malades comprendront surement parfaitement !
Vous êtes plusieurs à avoir demandé des nouvelles de Jade. C'est vrai que je n'en ai pas parlé mais ce n'est pas pour ça qu'on l'oublie. L'annonce de la rechute a été difficile pour elle aussi, elle est à un âge où elle comprend beaucoup de choses et elle aime tellement son petit frère ! On essaye de la préserver mais c'est une victime aussi du cancer. Nous veillons à ne pas la laisser trop au second plan et heureusement elle a un bon réseau de copines qui la soutiennent aussi beaucoup.
Vous êtes nombreux également à avoir posé la question d'envoi de cartes ou de colis pour Lucas. C'est très gentil à vous et je vous en remercie. Pour l'instant nous essayons de conserver un maximum de normalité dans la vie de Lucas. Je dis bien "essayons" car ce n'est pas toujours évident... Vouloir lui faire plaisir et le gâter pour compenser ce qu'il vit est normal, spontanément c'est notre envie aussi, mais je crois que ce dont il a avant tout besoin en ce moment, c'est de vivre une vie la plus normale possible, sans distinction "parce qu'il est malade" même si c'est de façon positive. Ceci dit, peut-être que "plus tard" (et en disant ça j'espère "jamais" ou "le plus tard possible") la situation évoluera et que votre soutien sera le bienvenu pour passer des moments plus difficiles...
Bon, je crois que j'ai fait le tour... Bravo si vous êtes arrivés jusqu'au bout !